Le froid est là !

Décembre et janvier ont été doux, mais cette fois ça y est, le froid est là, et bien là !

Alors il y a ceux qui restent bien au fond du lit ou les pieds dans les pantoufles au coin de la cheminée. Ils ne sortent pas par ce temps là ! ni quand il pleut d’ailleurs. Ni quand il fait trop chaud. Il ne connaissent les forêts françaises qu’entre le 15 juin et le 15 juillet… dommage.

D’autres veulent sortir à tout prix ! on est des hommes, des vrais, « le froid c’est psychologique »… ou, en bonne philosophie, « le froid n’existe pas, il n’y a que l’absence de chaud »… Certes. Mais ce n’est pas très malin de se mettre ainsi en difficulté.

Peut-être y a-t-il une voie médiane, celle du bon campeur, capable de sortir par tous les temps, et capable de se ménager son confort, non parce qu’il est douillet, mais parce qu’il est intelligent, prévoyant et débrouillard.

 

Pourquoi se soucier de sa température ?
Tout simplement parce que c’est quand même plus agréable. Mais aussi parce qu’il y a un vrai enjeu vital. C’est le premier enjeu auquel nous sommes confrontés lorsque nous quittons notre confort domestique. Si l’animal est naturellement vêtu de fourrure ou de plumes, le plus poilu d’entre nous, si « hipster » soit-il, ne fait pas le poids. Même dans nos contrées tempérées, en plein été, on peut mourir d’hypothermie en trois heures.

Se tenir au chaud, c’est donc préserver ses fonctions vitales, c’est aussi se préserver des petits désagréments qui peuvent devenir dangereux : gelures, perte de la dextérité fine (manipuler un couteau lorsqu’on a mal aux doigts et qu’on tremble… dangereux !) ou léthargie sont les moins graves, mais ils peuvent entraîner d’autres accidents.

 

Comment fonctionne mon corps ?
Lorsqu’on a trop chaud, nos vaisseaux sanguins se dilatent. La peau devient rouge et dissipe plus de chaleur. Le métabolisme diminue pour éviter la surchauffe, d’où cette sensation de fatigue lors des canicules d’été. Parallèlement, la transpiration favorise la perte de chaleur par évaporation. On peut suer jusqu’à deux litres d’eau par heure… sans pouvoir s’hydrater aussi vite. On voit le danger. Mais ce n’est pas ce qui nous guette actuellement.

Lorsqu’on a froid, c’est l’inverse. Le corps cherche à préserver les organes vitaux (cœur, cerveau, poumons…). Il contracte donc les vaisseaux sanguins. Les extrémités (doigts, orteils) sont moins irriguées, et le corps se concentre sur ses fonctions principales. Voilà pourquoi si on a froid aux mains ou aux pieds, il faut commencer par mettre un bonnet ! En réchauffant la tête, on permet au corps de s’occuper à nouveau de la périphérie. Si le froid persiste, le corps va se mettre à frissonner : il met en route une activité musculaire spécifique pour se réchauffer. On imagine bien que tout cela va consommer beaucoup d’énergie. D’où l’intérêt de bien se nourrir lorsqu’il fait froid, et de ne pas lésiner sur les graisses ou les sucres. Un bon petit bouillon sera toujours apprécié, quelle que soit l’heure de la journée !

Il n’en reste pas moins que les pertes de chaleur ne vont pas se faire uniformément sur tout le corps. Les zones particulièrement irriguées, ou avec une grosse artère qui passe en surface, vont perdre plus de chaleur. Ce seront celles qu’il faudra couvrir en premier. Ainsi, grosso-modo, on peut estimer qu’on perd :

20 % par les carotides et jugulaires => mettre une écharpe

20 % par la tête => un bonnet ou une capuche

20 % par les aisselles et les aines

10 % par chaque membre, et particulièrement le poignet et l’intérieur des chevilles (dans l’absolu, il vaut donc mieux avoir des mitaines avec une manche un peu longue que des gants qui couvrent le bout des doigt).

 

Un peu de physique
Passées ces considérations physiologiques, faisons un peu de physique, et voyons comment un corps peut perdre de la chaleur. Les échanges thermiques peuvent se faire de quatre manières.

Rayonnement
Tout corps émet et reçoit des rayons infrarouges. Typiquement, le soleil ou le feu émettent un rayonnement que nous sentons bien, et nous savons qu’il faut des flammes pour se chauffer autour du feu. Tout objet opaque bloque ou renvoie ce rayonnement. Plus l’objet est foncé, plus il va absorber la chaleur. Le rayonnement diminue avec le carré de la distance. Autrement dit, très vite. On le sait empiriquement lorsqu’on fait un feu : devant lui, on a trop chaud ; un ou deux pas en arrière, et on ne ressent plus la chaleur.

Pratiquement, on pourra construire un réflecteur, ou tendre une bâche derrière soi. Mieux encore, une couverture de survie renverra mieux ce rayonnement grâce à sa face aluminisée.


 

Evaporation
On sait bien que lorsque l’eau passe de l’état liquide à l’état gazeux, elle consomme de l’énergie. Il faut chauffer la casserole pour provoquer l’évaporation. Or, l’eau est vingt-cinq fois plus conductrice que l’air : c’est ce qui provoque cette sensation de froid lorsque vous sortez mouillé de la douche : le moindre courant d’air semble un vent glacial. Le vent sur le tee-shirt mouillé de transpiration provoque le même effet, et pompe la chaleur du corps. Même si on se couvre, rester avec des sous-vêtements humides nous refroidit. On peut en amont gérer son effort pour éviter de transpirer, mais il faut surtout ne pas hésiter à change de tee-shirt dès que l’effort est terminé.

 

Conduction
La nature aime l’équilibre. Lorsque deux corps sont en contact, l’un va pomper la chaleur de l’autre jusqu’à ce que l’équilibre thermique soit atteint. Lorsque vous vous asseyez sur un rocher froid, ou sur un banc dans le parc, votre corps va leur donner de la chaleur jusqu’à ce que le banc ou le rocher soit à la même température que vous… bon courage. C’est aussi ce qui se produit lorsqu’on dort sur le sol : notre petit cœur généreux essaye de réchauffer la terre… et on grelote toute la nuit. On cherchera donc à s’isoler du sol ou du banc, non pas par une simple bâche, qui pourra très relativement protéger de l’humidité, mais qui ne protègera pas du froid. Mais on cherchera à créer une couche d’air, qui est le meilleur isolant : c’est le principe des tapis de sol gonflables, mais aussi des tapis de sol en mousse qui emprisonnent des petites bulles d’air. Des branches de sapin, de la paille, auront le même effet. A la halte, si on ne veut pas sortir son tapis de sol, on préférera s’asseoir sur une corde lovée ou sur du bois, plus isolants que le rocher ou la terre.

 

Convection
L’air chaud – ou n’importe quel fluide d’ailleurs – monte et laisse la place à l’air froid, créant ainsi un courant d’air. C’est l’un des principaux phénomènes météorologiques, c’est aussi ce qui fait monter la fumée du feu, ou qui crée un « courant » dans votre casserole d’eau en train de chauffer. Il en est de même pour nous. Notre corps réchauffe – par conduction – la petite couche d’air qui est en contact avec notre peau. L’enjeu des bons vêtements sera de conserver cet air. Il n’empêche que particulièrement dans notre dos, cet air monte, et s’échappe par le col. Si on enfile notre capuche, on sent tout de suite une douce température s’installer. Parce qu’on se protège des courants d’air, mais aussi parce que cet air chaud qui monte reste emprisonné autour de la tête et crée un petit micro-climat. Moralité : une capuche, ce n’est pas fait pour lutter contre la pluie, mais contre le froid. Pour cette même raison, un abri ou un bivouac dont le toit est très haut nous fera perdre beaucoup de chaleur. Il vaudra mieux tendre sa bâche le plus bas possible. C’est encore le même phénomène qui se produit lorsque nous respirons, avec l’air froid qui rentre dans les poumons.

 

Vu ? Radiation, Evaporation, Conduction, Convection. La tête, le cou, les aisselles et les aines, les poignets et les chevilles.

Maintenant que nous connaissons tous ces mécanismes, nous allons pouvoir adapter notre comportement et nos habitudes à chaque situation. Nous verrons dans un prochain article comment mettre tout cela en pratique.

Laisser un commentaire