Le développement psycho-affectif de l’enfant

nCet article est réalisé d’après une conférence donnée par Sophie Martin-Grzybowski (conseillère conjugale et familiale) à l’ILFM le samedi 12 novembre 2016.

Voici quelques repères synthétiques sur le développement de l’enfant. Ce ne sont que des repères, qui n’excluent pas la nécessité de connaître chaque enfant en particulier. Il reviendra à l’éducateur tout à la fois de comprendre les enjeux et les mécanismes de ces périodes, tant pour en permettre l’épanouissement que pour corriger les excès.

0 à 1 an9 mois à 3 ans3 à 6 ans6 à 12 ans12 - 26 ans
• Période de la fusion.
• L’enfant ne fait qu’un avec sa mère (1).
• Suis-je ?
• Besoin primaire d’attachement.
• L’amour de sa mère développe sa confiance en lui.
• Découverte de la marche et de la propreté.
• 9 à 18 mois : exploration.
• Ne supporte pas les frustrations. Veut tout tout de suite (2).
• 18 mois à 3 ans : séparation.
• Apprentissage des frontières, des limites tant physiques que psychiques.
• Raisonne. Fais confiance aux parents.
• Période du non (3).
• Imagine et ressens beaucoup.
• Confusion entre la réalité et l’imaginaire : peur des sorcières, des fées.
• Manque de mots pour exprimer ses émotions (4).
• Où suis-je ? Se définit par rapport aux autres.
• Rôle du père devient plus important (5).
• Module son besoin.
• Sensible aux métaphores (6).
• Curiosité sexuelle, joue au docteur.
• Aime apprendre, développe ses compétences, se socialise, se sent capable.
• Pense par lui-même, d’une intelligence concrète : il aime fabriquer et construire.
• Différencie les sexes et les générations.
• Besoin d’indépendance et de coopération.
• Age de raison.
• Conscience de sa valeur (7).
• Aime refaire le monde, se pose des questions, les « Pourquoi ? », curieux.
• Aime être avec ses amis.
• Plus de questions sexuelles.
• Adolescence et puberté (8).
• Décharge hormonale, modifications corporelles.
• 26 ans : âge moyen de l’autonomie. C’est elle qui fait l’adulte.
• Qui suis-je ?
• Se questionne sur le sens de la vie, crise d’identité, s’interroge sur la norme.
• Ambivalence je veux / je ne veux pas (9).
• Expérimente beaucoup.
•Reproche aux autres ce qu’il ne supporte pas en lui.
• Différentes étapes (10).

 

1. Dans la première année, l’enfant est encore très uni à sa mère, il apprend petit à petit à distinguer les limites de son corps. C’est par la relation physique, par le toucher, qu’il peut faire cet apprentissage. Une défaillance de cette perception pourrait entraîner des pathologies comme la schizophrénie, la bipolarité, etc.

2. La défaillance mènerait aux états limites ou aux comportements borderline.

3. L’enfant exprime le « non ». Ce n’est pas systématiquement de la désobéissance ou de l’opposition, mais une prise de conscience de son espace intérieur qu’il veut et doit faire respecter. L’adulte réagit souvent avec un « c’est pas gentil » ou formule ainsi ses demandes « tu serais gentil de… ». Mais soit la demande n’est pas négociable, et il ne s’agit pas d’être gentil mais d’obéir ; soit elle est négociable, et il faut accepter l’éventualité d’un refus de l’enfant. Dans d’autres cas, on percevra que l’enfant cherche à « tester », à définir des limites que l’adulte doit savoir lui donner, et qui lui permettront de grandir en toute sécurité, avec des repères stables.

4. Difficulté à distinguer l’imaginaire, forte impressionnabilité, difficulté à exprimer ses émotions… il faut donc faire attention aux images violentes qui se présentent à l’enfant, tant lors du journal télévisé que… dans les dessins animés de Disney ! Il est important que l’enfant puisse exprimer ses sentiments, et il faut l’y aider, avec le plus de vocabulaire possible.

5. C’est l’action du père qui va permettre à l’enfant de trouver sa juste place dans la famille et dans sa relation aux autres. Ce père, qui nomme et reconnaît, donne les limites et les interdits. Mais ces limites ne sont pas qu’une contrainte, elles sont aussi l’assurance d’une sécurité qui permet l’épanouissement serein. Le père affirme aussi que sa femme lui appartient. Lorsque les femmes élèvent seules leurs enfants, il faut qu’il y ait un autre adulte qui permette de dé-fusionner, tant pour l’enfant que pour la mère. Sinon, celle-ci fait de l’enfant l’objet de sa vie, et le stérilise.

6. Il est bon, à cet âge, d’utiliser beaucoup de métaphores, de raconter par exemple des histoires avec des animaux. C’est la méthode de La Fontaine. Les métaphores – chez l’adulte aussi – s’adressent directement à l’inconscient et évitent le déclenchement immédiat de mécanismes de défense lorsque nous sentons une remise en question.

7. Si l’enfant ne se sent pas aimé pour ce qu’il est, s’il ne se sent pas porté par sa famille, il peut avoir deux réactions, qui le marqueront souvent pour de nombreuses années. Interprétant qu’il n’est pas comme il devrait être, se dévalorisant, il va facilement accepter une position de souffre-douleur, et tout accepter. Sinon, il va vouloir, d’une certaine manière, consoler ses parents de sa propre existence. Il se « parentifie », il devient maternel avec son entourage, veillant sur tous, y compris sur les adultes. Dans tous les cas, il s’en suit une perte de spontanéité, parce qu’il se met à analyser sans cesse comment il peut se corriger et apparaître acceptable aux yeux des autres.

8. En fait, ce que l’on nomme adolescence, c’est la période de la puberté, qui est d’abord un changement physique. L’adolescence est un concept très récent, et très occidental. Dans d’autres sociétés, on passe de l’âge enfant à l’âge adulte sans période de transition. On voit parfois des mamans considérer que leur petite fille est déjà pré-adolescente en CM1. La plupart du temps, c’est une projection de la part de mères qui, inconsciemment, veulent s’habiller dans les mêmes boutiques, veulent entrer dans une relation amicale avec leur fille. D’autres enfants vont paraître adolescents parce qu’ils vont agir par mimétisme et imiter les comportements des autres. Habituellement, la puberté arrive en 6e-5e chez les filles, en 4e-3e chez les garçons.

9. Bien souvent, lorsque l’adolescent répond « je ne veux rien », il nous signifie plutôt « je veux tout, mais je ne sais pas choisir » !

10. On peut diviser l’évolution de l’adolescent en différentes étapes :
Estime de soi : il s’aime lui-même, passe son temps à se regarder dans la glace. C’est la construction nécessaire d’un amour de soi, sans lequel il passera des années à utiliser les autres pour se remplir d’amour de lui-même. On peut schématiser l’évolution de cette évolution ainsi : amour de soi pour soi => amour de l’autre pour soi => amour de l’autre pour l’autre => amour des autres avec l’autre que j’aime.
Le meilleur ami : il fait miroir, et par effet de retour, permet de mettre des mots sur ses propres émotions.
La bande d’amis : permet l’ouverture aux autres, en bien ou en mal.
L’autre sexe : c’est l’âge du lycée. Il considère l’autre, commence à entrer dans un jeu de séduction.
Un certain type : il affine ses désirs, ses choix.
Entrée dans la vie adulte : il pose des choix responsables, accueille les différences parce qu’il est sûr de lui, il accepte ses limites, il est « moi en vérité ».

« Tous les adultes ont été des enfants »
Saint-Exupéry, Le petit prince

« Les enfants qui ne sont pas aimés pour ce qu’ils sont vraiment ne savent pas s’aimer eux-mêmes et,
devenus adultes, ils doivent apprendre à nourrir et à materner leur propre enfant perdu. »
Marion Woodman

 

 

 Développement intellectuelDéveloppement socialDéveloppement affectifComment l’accompagner ?
5 à 6 ans
CP
• Connaît 4000 à 5000 mots
• Comprend les explications sur les événements
• Raconte des expériences
• Utilise des intonations
• Capable d’attendre son tour
• Donne des ordres de grandeur
• Distingue les moments de la journée
• Résout des problèmes simples
• Comprend les règles et les respecte
• Rivalité avec ses pairs et conflits
• Recherche d’approbation adulte
• S’affirme et parle avec aisance
• A tendance à dénoncer lorsque les règles ne sont pas respectées
• Est plus compétitif, se compare
• S’excuse et trouve des gestes de réparation (11)
• Meilleur contrôle des émotions
• Peut gérer la frustration
• Peut jouer seul 30 minutes
• Confiance en lui
• Aime les jeux de rôle
• Meilleure distinction du bien et du mal
• Lui expliquer les règles
• Le faire raconter
• L’amener à trouver lui-même la solution dans les conflits
• Le faire observer et réfléchir (12)
• L’aider à attendre
• Diviser la tâche en petits défis (13)
6 à 8 ans (14)
CE1 - CE2
• Opérations mathématiques, mais encore besoin de concret
• Bon emploi des temps
• Lecture
• Expression verbale, conversations, phrases complexes
• Plus de 6000 mots
• Blagues, comprend le second degré
• Anticipe les scénarios
• Jeux collectifs
• Fait semblant, invente
• Conversation
• Rivalités et conflits
• Parle avec aisance avec ses pairs
• Bons comportements en groupe
• Peut s’excuser
• Partage et coopération
• Ecoute les autres
• Salue les adultes connus
• Cherche l’approbation des adultes
• Confiance
• Compétition
• Plus réaliste
• Comparaison
• Imitation de l’adulte
• Autonomie
• Recherche d’approbation
• Coopération
• Gestion des émotions
• Jugement moral
• Gestion des frustrations
• Persévérance
• Activités physiques extérieures
• Choix d’activités physiques qu’il aime
• Création de chorégraphies et de spectacles sur la musique
• Planification d’un moment de lecture quotidienne et en silence
• Proposer des livres documentaires (animaux, moyens de transports, pays…)

11. C’est un âge où on fera bien de le faire réfléchir sur ses fautes, et de lui faire chercher par lui-même des manières de réparer, ce pour quoi il pourra nous surprendre par son inventivité.

12. L’observation de la nature sera une grande source d’enseignements. C’est l’âge où il faut avoir des petits animaux dans la classe.

13. On veillera à stimuler chaque enfant selon ses compétences. A chacun, on fixera des objectifs à sa mesure, tout à la fois ambitieux et réalisables, pour le stimuler, sans pour autant le mettre en situation d’échec. Par étape, on peut l’emmener très loin. C’est la période du « je suis capable, je peux être ce que je choisis d’être ».

14. C’est le grand âge du développement moteur : agilité, coordination, flexibilité, équilibre… donc jeux de ballon, dessin…

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