En route ! #camp itinérant

Chefs, cheftaines, à la question d’un assistant, d’un scout ou d’un parent, avez-vous déjà répondu « parce qu’on a toujours fait comme ça » ? Avez-vous déjà senti peser la routine du camp ? Avez-vous l’intuition, au fond de vous, qu’au contraire le camp devrait se faire neuf chaque année ?

Vous n’êtes pas seuls…

Je prépare mon camp d’été.
J’ai appris qu’un grand camp cela se pense dès la rentrée et se prépare toute l’année. Donc je commence à y réfléchir en septembre.

Je ressors le programme de mon camp de l’été dernier et je lis:

  • 7-9 juillet: installations
  • 10 juillet: olympiades
  • 11 juillet (dimanche): repos – après-midi à remplir
  • 12 – 14 juillet: exploration
  • 15 juillet: repos (CdH) concours cuisine le soir
  • 16 – 17 juillet: grand jeu
  • 18 juillet (dimanche): pèlerinage- Promesses
  • 19 juillet: journée extra
  • 20 juillet: départ

Voyons… comment changer cette année ? Comment vais-je offrir du neuf à mes guides ?

Si l’on part des principes, que faut-il dans un camp ?

  • installations (3 jours),
  • grand jeu (2 jours) avec un jeu de nuit parce que les guides aiment,
  • concours cuisine,
  • olympiades,
  • exploration (3 jours),
  • veillées concours,
  • journée « extra »,
  • pèlerinage
  • 2 ou 3 journées repos

Eh bien, échangeons les activités !

  • 7-9 juillet: installations (là, pas tellement le choix)
  • 10 juillet (dimanche): matinée repos, concours cuisine le soir.
  • 11-13 juillet : explo…

Non… décidément, je ne suis pas satisfaite. J’ai l’impression de suivre une recette, un schéma figé et sans âme. Les guides aussi d’ailleurs… et même deviner le programme ne les amuse presque plus ! À ce train-là, je vais bientôt pouvoir noter chaque activité sur un petit papier, les mettre dans mon béret et remplir mon programme en piochant au fur et à mesure. A ce train-là, mes guides quitteront la Compagnie au bout de trois ans, parce qu’elles auront l’impression d’avoir tout vu, tout fait.

Alors que faire ?
Tout d’abord, voir le camp différemment. Imaginer. Sortir des « traditions » qui ne sont que routine. Le camp est le couronnement de l’année, au camp les guides vont montrer ce qu’elles valent. Au camp surtout, elles vont vivre leur scoutisme ; bien plus, le camp est une « retraite à ciel ouvert »… Le camp n’est pas d’abord un programme d’activités. Les activités ne sont que la mise en pratique d’un « projet pédagogique », comme on dit à la DDCS. Et même le mot activité ne me semble pas juste… le camp, c’est une vie, pas des activités.

Rien n’est obligatoire dans le camp ; et celui-ci ne sera pas raté s’il n’y a pas LE concu. La seule chose qui compte est d’organiser un truc chouette qui mette les filles en état d’être guides, de vivre la Loi, la Promesse et ainsi de côtoyer chaque jour Notre-Seigneur.

En fait, les vrais principes d’un camp sont:

  • la loi
  • la BA
  • le jeu

En fait, plus largement, les quinze éléments de base du scoutisme (explicités par Michel Menu), et tout particulièrement les cinq buts.

Au hasard quelques lignes de Conseils aux chefs scouts, de BP:

«Le scoutisme n’est pas une science abstruse ou difficile: si on le voit dans son vrai jour, c’est plutôt un jeu plein de gaieté. En même temps, il a une valeur éducative et, comme la bonté, il est aussi profitable pour celui qui donne que pour celui qui reçoit.

Le terme «scoutisme» désigne aujourd’hui un système d’éducation à la vie sociale par le jeu pour les garçons et les filles (…)

Quelqu’un a dit que ce qui manque aux jeunes est un milieu. Eh bien, nous avons un milieu à leur proposer dans le scoutisme et dans le guidisme, c’est celui que Dieu a mis à la disposition de tout le monde : le plein air, le bonheur, la capacité d’aider les autres.»

Voilà l’essentiel.

Ensuite, passer à l’acte. Oser. Tout est possible pourvu qu’on se donne un peu de peine.

Je te propose une idée qui devrait t’aider d’une part à changer ta propre vision du camp et celle de tes guides, et d’autre part à lutter contre la routine et ressusciter l’enthousiasme. Ce n’est pas une solution magique ni une recette. Il te faudra l’adapter à ta compagnie et la manipuler avec intelligence. Tu n’en verras peut-être les fruits qu’à long terme.

Le Camp itinérant !
Oh la la ! C’est compliqué à organiser ça ! Avec les règlementations françaises ! Est-ce qu’il faut des diplômes spéciaux ? est-ce qu’on peut camper n’importe où ? et puis il faut une logistique de dingue !… Et pourquoi d’abord ? C’est pour les Routiers… Qu’est-ce qu’on va faire ? Marcher toute la journée ? On ne pourra même pas faire d’installs ! Comment leur apprendre à faire des mi-bois ou des tenons ?

Eh ! Depuis quand le scoutisme se résume-t-il à un mi-bois ?

Oui. C’est un camp DIFFÉRENT. Autre déclaration, autre organisation, autres techniques, autre aventure… autres fruits !

Je ne prétends pas qu’il suffise de faire un camp « normal » durant lequel on se déplace (de toutes façons on ne peut pas), ni qu’il suffise d’alterner camps fixes et camps itinérants pour résoudre le problème de la lassitude. Je veux dire qu’organiser un camp de ce type, sera pour une cheftaine – et pour une guide – l’occasion presqu’inévitable de revoir profondément son idée du camp, de faire preuve d’imagination, de vraiment créer son camp. Cela permettra d’ouvrir, pour la maîtrise et les patrouilles, de nouveaux horizons. On verra comment concrétiser une idée. Comment un rêve devient une réalité.

Une telle rupture avec ses habitudes libère l’imagination, et l’on devient capable ensuite de sortir camps fixes et tous les autres de la routine.

Ce changement réveille aussi les patrouilles pour leur donner un nouvel élan. Et après… ce sont elles qui ont des idées!

Assurément, avec un peu d’organisation, des assistantes et des CP efficaces, les difficultés ne sont pas insurmontables.

 Deux écueils 

• L’effet antibiotique
Je ne t’engage pas à dénigrer et abandonner tout ce qui se fait habituellement. Je déplore seulement le côté routinier et presque carcéral des activités « traditionnelles ». Le grand jeu c’est très bien ; il faut simplement veiller à ce que l’on ne joue pas seulement durant le grand jeu. La veillée concours est excellente et développe beaucoup de qualités chez les guides ; mais elle ne doit pas éteindre l’essence de la veillée – ce moment convivial et fraternel de joyeuse détente après une journée bien remplie – pour en faire un moment de grand stress alors qu’on aurait envie d’aller dormir. Le concours cuisine est très intéressant ; mais sera-t-il le seul repas où la cuisine doit être soignée et la courtoisie reine ? Faire des installs ultra solides à grand renfort de plans précis et d’assemblages savants est très bon, mais une guide doit aussi être capable de s’installer correctement en quelques instants, quel que soit le lieu.

Je ne te te conseille pas non plus, lorsque tu auras testé le camp itinérant, de ne faire plus que des camps de ce type en rejetant le camp fixe et tout ce que tu faisais auparavant. Il est nécessaire pour nos adolescents de se poser, d’avoir leur « chez eux », et il n’y a pas de bonne ou mauvaise formule de camp. Il y a un camp pensé ou un camp… répété. Et quitter une routine pour tomber dans une autre…

Enfin, tu l’auras compris, le camp « habituel » n’est pas mauvais ; il demande à être revivifié. Tu sauras plus facilement le faire si tu as vraiment débridé ton imagination en frappant un grand coup.

• L’art pour l’art
On ne choisit pas telle ou telle sorte de camp « comme ça », au hasard. On ne fait pas du changement pour le changement, de l’original pour l’original, et organiser un camp itinérant n’est pas une fin en soi. Tes choix auront une raison et du sens. Sinon on risque de retomber dans « l’activité ».

Pour cela, avant de te demander quelle formule de camp tu vas choisir et ce que tu vas faire pendant le camp, demande-toi :

  • de quoi tes guides ont-elles besoin ?
  • quels sont les qualités et les défauts de ta compagnie ?
  • que veulent tes guides ?
  • quel était ton projet pédagogique de l’année ? tes axes de progression ? Tu les avais choisis en fonction des réponses aux trois premières questions.

Et n’oublie jamais d’analyser tes idées à travers le filtre du scoutisme :

  • est-ce que cette idée que je trouve géniale, c’est du scoutisme ? Pour faire simple, reprends les quinze éléments de base.
  • est-ce qu’elle permettra à mon unité d’observer la Loi et de se conduire scoutement ? et ensuite : concrètement, que vais-je mettre en place pour que durant ce camp mes guides progressent dans leur scoutisme ?

Décidée ? Alors en route!

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